Génération Z & Marché du Travail : Paresse, Malentendu ou Révolution Silencieuse ?

Plus d’un manager américain sur trois préfère aujourd’hui embaucher une intelligence artificielle plutôt qu’un·e jeune diplômé·e de la génération Z.

Faut-il y voir un signal d’alarme ou un changement de paradigme ?

Une jeunesse confrontée à un mur

Les chiffres sont brutaux.

Selon une étude relayée par Forbes début 2025, 37% des managers américains affirment préférer embaucher une IA plutôt qu’un membre de la génération Z.

Et 45% recruteraient plutôt un freelance ou un ancien employé.

Les raisons évoquées sont récurrentes :

  • Manque d’expérience concrète

  • Difficulté à travailler en équipe

  • Coûts jugés trop élevés pour la formation

  • Manque de professionnalisme et de rigueur

Conséquence directe : les emplois d’entrée de gamme – longtemps considérés comme des tremplins vers l’autonomie – disparaissent ou sont automatisés.

Dans des secteurs comme la finance, le droit ou la tech, ce ne sont plus les juniors qui traitent les tâches répétitives, mais des IA, ou quelques profils seniors assistés par IA.

Le marché ne suit pas.

📊 Le taux de chômage des 20-24 ans atteint 8,3 % aux États-Unis, soit plus du double de celui des 25-54 ans.

📊 En Europe, plus de 20 % des jeunes sont au chômage en Espagne, Grèce, Portugal, Suède… et près de 15 % au Royaume-Uni.

L’éthique de travail de la Gen Z en question

Ce rejet de la génération Z ne vient pas de nulle part. Depuis quelques années, des données viennent interroger leur relation au travail.

Une étude de référence, menée aux États-Unis dans le cadre du projet Monitoring the Future (1976–2022), met en lumière une évolution frappante des valeurs des jeunes :

Moins de motivation à se dépasser :

  • En 2020, 54% des jeunes de 18 ans se disaient prêts à “faire de leur mieux au travail, même si cela signifiait travailler des heures supplémentaires”.

  • En 2022, ce chiffre tombe à 36%.

Le travail perd son statut central :

  • En 2020, 27% des jeunes déclaraient que le travail serait “une partie très centrale de leur vie”.

  • En 2022 : 19% seulement — le niveau le plus bas depuis le début du sondage en 1976.

Moins d’espoir en une carrière épanouissante

  • En 2013, 77% des jeunes s’attendaient à une carrière “extrêmement satisfaisante”.

  • En 2022 : 59%.

À cela s’ajoutent les observations de Gallup, qui confirment une baisse de l’engagement au travail, particulièrement chez les moins de 35 ans.

Désengagement ou transformation culturelle ?

Alors, la génération Z est-elle vraiment paresseuse ? Ou sommes-nous en train d’assister à un réalignement profond des priorités et des valeurs ?

Plusieurs hypothèses peuvent éclairer ces données :

1️⃣ Fatigue post-pandémie

Les années 2020-2022 ont laissé des traces. Confinements, enseignement à distance, incertitudes… Cette génération est entrée dans la vie active dans un climat de fatigue émotionnelle généralisée.

2️⃣ Priorités réévaluées

La pandémie a été un électrochoc. Pourquoi sacrifier son bien-être personnel à un travail sans sens ?
Résultat : un rejet de la culture du surmenage, et un désir d’équilibre vie pro / vie perso plus affirmé.

3️⃣ Un marché du travail temporairement favorable

En 2021-2022, la “Grande Démission” a offert aux jeunes la possibilité d’être plus sélectifs, de refuser certaines normes ou environnements de travail toxiques.

4️⃣ Un pessimisme économique croissant

La génération Z exprime un scepticisme marqué envers le capitalisme.
Nombreux sont ceux qui ne croient plus au mythe de la méritocratie. Le système semble biaisé, donc inutile de “jouer le jeu” à fond.

5️⃣ L’effet des réseaux sociaux

Des phénomènes comme le quiet quitting sur TikTok ont participé à normaliser certaines attitudes. Mais ces tendances sont peut-être le symptôme d’un mal-être, plus que sa cause.

Et maintenant, on fait quoi ?

La génération Z se retrouve face à un paradoxe cruel :

On lui demande de l’expérience, mais on ne lui donne pas de première chance.

On critique son rapport au travail, mais on ne revoit pas les règles du jeu.

Si la perception actuelle ne change pas, le fossé entre les employeurs et les jeunes talents va continuer de se creuser. Et dans un monde qui évolue aussi vite, on ne peut pas se permettre de laisser une génération entière sur le banc de touche.

Ce que cela révèle, au fond…

Ce débat ne parle pas que de jeunes.
Il nous force à reconsidérer notre vision du travail, de la valeur, de l’effort, du sens.

Et si, derrière cette supposée “crise de l’éthique de travail”, se cachait une transformation culturelle saine ? Un rejet des modèles dépassés ? Une demande de respect, d’autonomie, de cohérence ?

À méditer.

Et surtout, à discuter. Car si la génération Z change les règles… c’est peut-être à nous tous de réinventer le jeu.

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